Les étapes de la production de semences bio

En 2011 lors du salon du Miffel Franck Roelofs, directeur commercial de l’entreprise hollandaise Rijk Zwaan affirmait que « Nous souhaiterions élargir notre gamme bio, mais nous avons besoin d’un rendement minimum ».

En 2005, Dominique Planchenault, directeur du Bureau des ressources génétiques (BRG) apportait un constat un similaire « Si le travail des sélectionneurs a indubitablement entraîné une hausse de l’offre et de la diversité au sein des espèces cultivées, force est de reconnaître que, in situ, les impératifs de rendement concentrent la production agricole sur un petit nombre de variétés. ».  

Plus de 10 ans plus tard, alors que le développement de la bio apparait comme un impératif pour assurer la sécurité alimentaire mondiale de manière durable, dans quelles mesures la production de semences bio peut favoriser la diversité tout en assurant un rendement économique satisfaisant ?

Après Qu’est-ce qu’une graine bio, Dr Jonquille & Mr. Ail enquête et vous détaille les étapes de la production de semences bio

La production de fruits et légumes bio  

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Avant de parler de la production de semences contemporaines, il importe de rappeler l’intérêt grandissant pour les produits bio sur le marché français.

Selon l’agence bio, l’évolution de la vente de produits alimentaires bio a augmentée de 74% en France entre 2016 et 2021 tout circuits confondus hors restauration pour atteindre le seuil historique des 12,7 Milliards d’euros.

On recensait en 2022 plus de 58 000 exploitants agricoles en bio (soit un peu plus de 13% du total national).

On assiste ainsi à une profonde mutation des attentes des consommateurs impactant directement l’agriculture française sur tout le cycle de production, de la semence à la récolte.  

C’est précisément aux prémices du cycle végétal que l’offre semble insuffisante. Selon Mathy Roche du GABB Anjou : « d’un côté la demande des consommateurs en matière de semences potagères est croissante, de l’autre, les producteurs sont peu nombreux et les rendements souvent instable ».

La Semae rapporte pourtant en 2022 une progression de plus de 25% des surfaces de production de semences bio par an mais la filière accuse toujours d’un retard important : Avec seulement 22 500 ha en 2021, la production de semences bio ne représentait que 6% des surfaces nationales de production de semence (contre 10 % pour la bio par rapport à l’agriculture en général).  

Quelles sont les étapes de la production de semences bio ?

Pour être certifié bio, les producteurs de légumes et fleurs doivent utiliser des semences bio.

On considère une semence bio lorsque la plante mère a été cultivée conformément aux règles de l’agriculture biologique pendant au moins une génération ou, s’il s’agit de cultures pérennes, deux saisons de végétation.

La demande de dérogation est possible, si le producteur ne trouve pas de variétés adaptées à ses besoins. On dénombrait 22 000 dérogations pour les cultures potagères en 2019.

Pour de nombreux acteurs de la filière ce système de dérogation est un frein au développement des semences bio.  

Les semences bio commercialisées peuvent être des hybrides F1 ou des variétés de population tant qu’elles respectent le cahier des charges de la Semae en termes de distinction :

  • Plantes semblables en apparence doivent se différencier par un ou plusieurs caractères
  • Homogénéité : la semence doit produire des plantes similaires
  • Stabilité (rendements constants) et qu’elles soient inscrites au catalogue officiel européens.

Les exploitants peuvent utiliser des variétés de population non inscrites au catalogue et peuvent les vendre seulement dans le cas où le producteur de la semence vend directement à l’utilisateur final ou dans le cas où ce sont des espèce non réglementées (panais, physalis, pissenlit…).

Par ailleurs, depuis 2020 il est possible de vendre aux jardiniers amateurs des semences du domaine public non inscrites au catalogue pour lesquelles il n’existe pas un titre de propriété. 

Les hybrides F1 sont privilégiées par les circuits longs qui vont rechercher des critères de conservation dans le temps, de productivité, d’homogénéité des produits, de résistance aux maladies, aux ravageurs et aux aléas climatiques.

Les variétés de population sont plutôt privilégiées par les circuits courts et les particuliers pour la renommée des variétés, leur ancrage dans un territoire, l’adaptabilité à des conditions locales spécifiques et la diversité génétique.

Par ailleurs les variétés de population présentent l’avantage de pouvoir être cultivées et ressemées années après années sans que leurs caractéristiques ne soient fondamentalement altérées alors qu’une semence hybride une fois ressemée sera parfaitement instable. 

Le mode de production des semences bio 

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Le schéma culturel de la production de semences biologiques est assez similaire aux productions maraichères mais nécessite la pollinisation, la montée en graines et la récolte des semences tout en assurant une pureté variétale et un taux de germination optimal.

La culture de plantes bisannuelles consommées comme des annuelles est plus longue car elles mettront 2 ans à monter en graine (carotte, persil, chou) et nécessite une avance de trésorerie.

Certaines espèces doivent être isolées pour éviter des hybridations (carotte, oignon).

Pour ces espèces les agriculteurs s’efforcent de traquer tout adventices qui pourraient polliniser les cultures dans un rayon de plusieurs km et ont souvent recours à des tunnels insect-proof.

Enfin la récolte des semences est une étape délicate et technique, difficilement mécanisable. 

Les semences bio ne peuvent pas être traitées, un stockage en chambre froide est donc nécessaire pour éviter la prolifération d’insectes.

Le fait de ne pas utiliser de pesticides pour la culture et le stockage font que le coût de production des semences biologiques est en moyenne deux fois plus chères que les semences conventionnelles.

Le GABB Anjou estimait en 2017 que les cultures de semences potagères sont réussies 1 année sur 4, là où les besoins du marché en termes de volumes et des producteurs en termes de stabilité des revenus devrait excéder un taux de réussite de 75% 

Les acteurs de la filière 

Les obtenteurs  

L’obtenteur ou sélectionneur est une entreprise spécialisée dans la création de nouvelles variétés de semences.  

Les producteurs de semences bio 

Les producteurs de semences multiplient les semences par contrat avec les agriculteurs multiplicateurs et assurent le nettoyage, traitement, conditionnement et la commercialisation des semences. Ils ne produisent pas nécessairement les semences dans les champs mais assurent un suivi technique avec les agriculteurs-multiplicateurs.  

Les agriculteurs multiplicateurs 

Les agriculteurs multiplicateurs de semences (AMS) produisent dans les semences dans leurs champs à partir des semences fournies par les entreprises de production. 

Les distributeurs 

Les distributeurs sont en charge la vente des semences aux agriculteurs, aux particuliers, aux collectivités et aux centres de conservation.

On retrouve des structures agricoles, des jardineries, pépinières des grandes surfaces de bricolage, des grandes surfaces et des sites de vente en ligne.

De nombreuses épicerie bio proposent également des semences bio aux jardiniers amateurs.

Certains distributeurs achètent les stocks en gros, stockent et ensachent et vendent les semences en marque blanche en plus petits conditionnements.  

Les défis de la semence bio  

La filière bio présente de nombreux défis :

  • L’offre variétale reste insuffisante pour répondre aux besoins des maraichers bio et des jardiniers amateurs.
  • Les coûts élevés de maintien des variétés anciennes et de création variétales rendent la recherche plus difficile et le maintien des dérogations limite son intérêt.
  • La complexité des itinéraires culturaux, le caractères aléatoire des résultats et la faible valorisation des contrats rendent le recrutement d’agriculteurs–multiplicateurs spécialisés dans la bio difficile.

Conclusion

Dr. Jonquille & Mr. Ail s’engagent activement à collaborer avec des producteurs et obtenteurs qui offrent des variétés de semences bio et reproductibles.

Ces semences sont soigneusement sélectionnées pour être adaptées aux spécificités du territoire et répondre aux attentes des jardiniers concernant la productivité et la résistance aux maladies et aux ravageurs.

Cette approche permet aux variétés de s’adapter et d’évoluer en réponse aux mutations des pathogènes, assurant ainsi une agriculture plus durable et résiliente.

Les défis sont donc multiples, mais nécessaires afin de favoriser la diversité végétale et proposer des alternatives pour établir des modes de consommation et de production durables. 

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