Les bourdons du jardin : attirez et recensez les rois de la pollinisation

Le printemps, période des semis, est aussi celle du grand retour de la biodiversité. Oiseaux, papillons, abeilles, bourdons : la plupart sont déjà là, virevoltant au-dessus de nos pelouses fleuries. Parce que prendre soin de son jardin ne se limite pas aux semis et à l’arrosage, nous vous proposons de partir à la rencontre de cette petite faune qui nous accompagne durant nos séances de jardinage.

À travers plusieurs programmes de sciences participatives, le Muséum national d’Histoire naturelle nous met à contribution pour rendre compte de la biodiversité qui nous entoure. En plus d’aider les scientifiques à mesurer l’état de santé de ces espèces « communes » dans les espaces privés, vous apprendrez petit à petit à les reconnaître. Et à les accueillir ! Car un jardin vivant profite à tous : aux animaux certes, mais aussi à nos végétaux. Alors rangez définitivement vos produits phyto et ouvrez l’œil. Après les oiseaux, les papillons, troisième mission : le comptage des bourdons.

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Sherpa floricoles : les bourdons comme pollinisateurs hors pair

Il existe une quarantaine d’espèces de bourdons en France. Ils appartiennent à la même famille que les abeilles (Apidae), mais s’en distinguent par leur corpulence massive, leur épaisse fourrure, leur bourdonnement grave et leur personnalité débonnaire. Pourvu qu’on ne les taquine pas trop (la femelle possède un aiguillon et peut piquer), ces grosses boules velues se montrent généralement pacifiques. Pas étonnant qu’elles jouissent d’un tel capital sympathie auprès des jardiniers. 

Mais saviez-vous qu’en plus d’être sympathique, le bourdon est aussi un excellent pollinisateur. L’un des meilleurs ! Ses poils piègent facilement le pollen. Couverts d’un manteau jaune, enduits jusqu’aux antennes, et flanqués de deux pelotes sur les pattes arrières, ils deviennent parfois méconnaissables en sortant d’une fleur. S’ils volent moins vite que les mouches ou les abeilles, ils acheminent plus de pollen par visite, ce qui les rend très performants. De véritables sherpa floricoles ! 

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Les bourdons communiquent avec les fleurs… en chantant

Les bourdons sont surtout les seuls à pouvoir polliniser certaines plantes. Et de quelle manière ! Voici deux exemples. 

La Nature faisant bien les choses, les différents insectes pollinisateurs se sont répartis les tâches. Chacun s’est spécialisé dans un type de fleur. Ainsi certains bourdons, comme le bourdon des jardins (Bombus hortorum) disposent d’une langue plus longue que les autres leur permettant de butiner des fleurs que les abeilles ne peuvent pas atteindre– et donc de les polliniser. Le trèfle violet des prés (Trifolium pratense) en particulier se reproduit ainsi.

Plus incroyable encore, certaines plantes sont fécondées sous l’effet… du chant des bourdons ! La fleur de la tomate ne libère son pollen qu’après perception de leur bourdonnement très particulier. Les ondes sonores renvoyées par l’abeille domestique par exemple laisseront la fleur de marbre. Une magnifique démonstration de coopération exclusive, sur laquelle repose l’existence de nos tomates. Sans bourdons, pas de ketchup. Ou presque : il est possible de reproduire artificiellement ces vibrations. Mais la plupart du temps, pour cultiver ces fruits en serre, les maraîchers élèvent des bourdons. 

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Les bourdons, pollinisateurs du froid

Lors de journées fraîches ou à la fin de l’hiver, les bourdons ont tendance à être les plus présents sur les fleurs. Couverts d’une fourrure isolante, ceints de bandes noirs qui absorbent la chaleur : ils peuvent voler sans problème par moins 5 degrés, quand l’abeille domestique ne met pas l’antenne dehors en dessous de 15 degrés. 

Problème : les bourdons sortent parfois avant même l’apparition des premières fleurs… Leur technique ? Impatients, ils percent alors les feuilles de la plante. Cette dernière, sous l’effet du stress, déclenche la floraison plus tôt que prévu. Cela peut aller jusqu’à une précocité de deux semaines pour la moutarde noire et un mois pour la tomate. 

Comment attirer ces pollinisateurs hors pair au jardin ?

Le bourdon est donc indispensable pour la survie de nombreuses espèces végétales. Et, comme pour tous les pollinisateurs, sa situation est alarmante. En 2014, 24% des espèces de bourdons d’Europe étaient menacées d’extinction sur la Liste rouge de l’UICN. En cause : les aménagements urbains, la raréfaction des ressources en fleurs, les effets des pesticides. 

Sachant cela, comment favoriser leur présence dans notre jardin ? Un : faites pousser des plantes qui les attirent, c’est-à-dire des plantes à la fois riches en nectar et en pollen, souvent les mêmes qui attirent tous les pollinisateurs comme la lavande, le népéta, le fenouil, la bourrache, le romarin… Et bien sûr toutes celles mentionnées plus haut, qui en sont dépendantes : tomates, trèfle, entre autres. 

Mais les fleurs ne font pas tout. Quand ils ne volent pas, les bourdons vivent principalement sous terre, dans les souches d’arbres morts. Il leur arrive même de squatter un petit terrier abandonné par un rongeur. Pensez donc à ménager ces espaces : trous, failles, brèches. Vous pouvez également installer des nichoirs. Ces nids sont d’autant plus importants que les bourdons, en particulier la reine, y passeront une bonne partie de l’année. Elle y séjourne tout l’hiver, seule, et recrée des nids au printemps pour fonder une colonie. Cette dernière, contrairement à celle des abeilles domestiques, est renouvelée tous les ans. Et chaque trou compte : une colonie créée par une seule reine peut comporter de 200 à 300 pollinisateurs hors pair ! 

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Participez à l’Opération Bourdons !

Avant toute chose : apprenons à les connaître. C’est ce qui vous donnera envie de les protéger. Comment ? En participant à l’Observatoire des bourdons, un programme de sciences participatives piloté par le Muséum national d’Histoire naturelle et le groupe associatif Estuaire. Le principe est simple : 

  1. Toute l’année je compte les bourdons de mon jardin pendant 5 minutes
  2. Pour chaque espèce je note le nombre d’individus maximum vus simultanément. Si besoin, je m’aide la fiche d’identification. 
  3. Je note le nombre de jours d’observation réalisés dans la semaine
  4. Je note toutes les semaines mes résultats sur le site https://www.sciences-participatives-au-jardin.org/edito/bourdons

Pour les identifier, il faut bien regarder la disposition, la largeur et la couleur des bandes corporelles. Deux bandes jaunes, une sur la tête, une autre sur le corps, et deux bandes blanches à l’arrière ? Un bourdon terrestre bien-sûr ! Des bandes oranges à l’arrière ? Forcément le bourdon des prés. 

Grâce à vous, les chercheurs pourront améliorer nos connaissances sur les bourdons et comprendre l’impact de l’urbanisation, du climat ou encore des pratiques de jardinage sur les espèces. Vous faites cela pour vous et pour la science. D’une pierre deux coups. A vous de jouer !

Pour participer à Oiseaux des jardins et en savoir plus sur le programme c’est par ici https://www.sciences-participatives-au-jardin.org/edito/bourdons

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