Qu’est-ce qu’une graine reproductible

Dans notre série d’article sur quel type de graines choisir pour son potager Dr. Jonquille & Mr. Ail vous propose aujourd’hui de mettre en lumière un type de graine qui nous est cher : les semences reproductibles.

La sélection de semences : une histoire de cueillette.

Nous sommes à l’âge de Pierre et évidemment… Pierre n’est pas là. Paul en revanche s’affaire à évoluer. Il maitrise déjà le feu et commence depuis quelques années (10.000 av. J.-C.) à domestiquer les plantes sauvages qu’il est habitué à cueillir. Il s’est d’ailleurs aperçu qu’il pouvait récupérer des graines, notamment des graines de céréales et les ressemer pour se nourrir. C’est à partir de ce constat que l’homme a commencé à se sédentariser afin de cultiver des plantes et élever des animaux pour se nourrir, se soigner, combattre ses ennemis et s’habiller.

Au fil des siècles celui qui est désormais devenu un agriculteur va pratiquer la sélection de semences de manière empirique : non pas à la Napoléon, mais plutôt de manière aléatoire par l’observation et la multiplication d’expérimentations. Le procédé consiste à isoler une plante pour ses caractéristiques remarquables comme sa productivité, son attractivité, sa vigueur, à récupérer les semences et à les ressemer l’année suivante. De génération en génération on peut alors parvenir à préserver les propriétés remarquables des plantes isolées et développer de nouvelles variétés.

L’histoire de la tomate est à cet égard assez édifiante. Originaire du Pérou c’est pourtant les Aztèques, installés dans l’actuel Mexique, qui commencèrent à la domestiquer. Découverte au XVIe siècle par les conquistadores elle est progressivement introduite et acclimatée en Europe. Solanum lycopersicum n’était à l’époque pas plus grosse que les tomates cerises, très acide et probablement jaune, ce qui lui a valu le nom de pomodoro en italien, la pomme d’or. Il faudra alors deux siècles pour qu’en France la tomate soit considérée comme une plante potagère – ses fruits était d’abord jugés comme non comestibles de par leur ressemblance avec la Belladone, une plante connue pour sa toxicité. Progressivement les horticulteurs ont ainsi sélectionné les semences de tomate pour en obtenir des variétés aux fruits plus gros, plus rouge et plus sucrés.

Graines anciennes, graines paysannes et reproductibles. Kesako ?

Du latin pagus, le pays, le paysan est celui qui vit à la campagne des activités agricoles. Traditionnellement toutes les semences étaient donc paysannes puisqu’elles correspondaient aux semences récoltées, conservées et ressemées d’une année sur l’autre (découvrez les 5 astuces pour conserver ses graines). Comme pour la tomate jusqu’au XXe siècle les paysans et les horticulteurs ont ainsi opéré une sélection de masse sans connaissances en génétique pour créer de nouvelles variétés.

L’hybridation en question

L’hybridation correspond au croisement entre deux plantes, à la fécondation de l’ovule d’une plante par le pollen d’une autre plante. C’est un phénomène naturel chez les plantes allogames, c’est à dire qui ont des pieds mâles et femelles séparés. C’est en revanche un phénomène provoqué par le sélectionneur lorsqu’il croise deux plantes pour associer des caractères remarquables. La complexité de ce processus provient du fait que les résultats sont très aléatoires.

AU XIXème siècle Gregor Mendel, un moine autrichien va mener une série d’expérimentation en croisant des petits pois. Ses travaux vont lui permettre de publier en 1865 une série de lois sur la transmission des gènes. Le travail de Gregor Mendel mort en 1884 ne suscita que peu d’enthousiasme auprès de ses contemporains. C’est finalement au début du XXe siècle que les lois de Mendel vont être redécouvertes, les travaux de sélection vont alors connaitre une nouvelle dimension. L’agronome George Harrison Shull va notamment créer le concept d’hybride F1 en 1908.

Un hybride F1 correspond à la première génération d’un croisement de deux variétés distinctes de lignées pures, c’est à dire des variétés qui transmettent à 100% le même patrimoine génétique à leurs semences « enfants ». On va par exemple croiser une variété de lignée pure de tomate très rouge avec un autre variété de lignée pure de tomate présentant un gène bloquant le murissement du fruit pour créer une tomate très rouge qui pourrira très lentement. La particularité des semences hybrides F1 c’est qu’elles proposent de très bons rendements, mais une fois ressemés elles seront parfaitement instables.

En France les hybrides F1 ont été introduites dans les années 1950 pour industrialiser la production agricole en augmentant les rendements et en proposant des variétés plus résistantes aux ravageurs et aux aléas climatiques. Cette nouvelle révolution agricole a cependant impacté la biodiversité végétale. Le généticien José Esquinas Alcazar, figure emblématique de la FAO, estime que 75 % de la diversité des cultures a été perdue au XXe siècle. L’enjeu de la prochaine révolution verte sera donc de maintenir et de cultiver cette diversité génétique aux origines sauvages qui, depuis Pierre et Paul, a façonné la domestication végétale. On espère que Pierre répondra présent…

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